Tribune

Attaque à la préfecture de police: «Comment ne pas s’interroger sur le mode opératoire?»

Après la terrible attaque au couteau survenue à la préfecture de police de Paris jeudi 3 octobre, et sans présumer des conclusions de l’enquête, l’avocat Guillaume Jeanson souligne la troublante ressemblance avec les récentes attaques au couteau, notamment celle de Villeurbanne.

Publication
4 octobre 2019
Durée de lecture
1 minute
Média
FigaroVox

Extrait de l’entretien de Me Guillaume Jeanson dans le FigaroVox

FIGAROVOX.- Déjà exténués par des conditions de travail difficiles et alors qu’ils dénonçaient la montée d’un sentiment «anti-flic», la veille les policiers ont été endeuillés dans leurs propres murs jeudi…

Guillaume JEANSON.- Mes pensées vont bien sûr d’abord à chacune des victimes, à leur famille et à leurs proches. Elles vont ensuite à leurs collègues. Des collègues déjà durement éprouvés ces derniers mois. Alors que les suicides se multiplient dans leurs rangs. Alors que les tensions ne cessent de croître. Alors que cette semaine a justement été le théâtre d’une mobilisation inédite, cette «marche de la colère» qui a vu défiler mercredi des milliers d’entre eux pour crier leur désespoir devant une situation qui ne cesse de se dégrader. Cette attaque vient encore dramatiquement secouer une institution déjà fortement ébranlée.

Une enquête est en cours. Il semblerait que le suspect se soit récemment converti à l’islam. Si cette information est confirmée et si elle présente un quelconque lien avec l’attaque commise, de nombreuses questions se posent sur la sanctuarisation d’un lieu aussi sensible que la préfecture de police de Paris?

Vous avez raison, l’enquête est en cours et il faut donc appréhender avec prudence les informations qui perlent dans la presse. De façon assez curieuse, on a d’abord entendu parler d’une déception amoureuse, puis d’un conflit avec la hiérarchie, puis d’une conversion à l’islam dix-huit mois plus tôt, puis d’un handicap de surdité, puis d’une «fragilité psychologique», puis d’un «coup de folie», puis «des voix» entendues la veille, puis des cris nocturnes d’«Allah Akbar»… sans qu’il soit véritablement possible de déterminer quel crédit leur accorder. Il appartient aux enquêteurs d’opérer un tri sérieux et d’exhumer des parcelles de vérité. Une vérité que tout le monde attend. Une vérité nécessaire, comme condition première pour éviter qu’un tel drame ne se reproduise.

En l’attendant, difficile tout de même de ne pas taire certains questionnements. D’autant lorsque l’on sait, que même si le parquet antiterroriste n’est pas saisi à l’heure où ces lignes sont écrites, il était en alerte hier toute la journée. Comment ne pas s’interroger devant le mode opératoire de ce périple meurtrier? Un mode opératoire qui résonne en effet étrangement avec toutes ces attaques au couteau, présentées comme des «actes isolés», et avec certains des attentats perpétrés les plus récemment: Villeurbanne, Condé sur Sarthe… Comment ne pas s’étonner devant l’articulation curieuse entre l’affirmation rapide d’un «coup de folie» soudain et la préméditation qui perce malgré tout derrière la décision d’emporter avec soi un couteau de cuisine indétectable sur un lieu de travail hautement sensible? Héritière des RG de la Préfecture de Police, la DRPP est en effet chargée de la collecte et de l’analyse d’informations portant notamment sur des sujets liés au terrorisme. Hébergée au sein de cette citadelle qu’est la préfecture de police de Paris, à quelques enjambées du vieux palais de justice de l’Ile de la Cité, elle avait justement vu ces effectifs renforcés sous l’égide du Plan de Lutte Antiterroriste de l’ancien Premier ministre Manuel Valls. Le tueur était-il radicalisé? Si oui, comment était-il possible qu’il soit en poste dans une administration aussi sensible? Devons-nous redouter que d’autres profils de ce type, dans la fonction publique, passent sous les radars?

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