Tribune

«Il faut adapter la politique pénale à la nouvelle violence qui sévit en France»

Le Premier ministre a annoncé hier de nouvelles mesures pour protéger les policiers. Si ces annonces sont bienvenues, il est désormais nécessaire de traiter en profondeur le problème de la délinquance, estime le délégué général de l'Institut pour la Justice, Pierre-Marie Sève.

Publication
12 mai 2021
Durée de lecture
2 minutes
Média
FigaroVox

Courant après une actualité tragique, le Premier ministre Jean Castex a annoncé hier un durcissement des peines contre les agresseurs de policiers ou de gendarmes. Si certaines des mesures sont bienvenues, elles relèvent essentiellement de la gestion de crise et non pas du traitement de fond dont la société française a besoin.

La France est devenue un pays violent

Derrière le meurtre du policier Eric Masson, il y a un fait : la France est devenue un pays violent. Sans atteindre encore les niveaux de pays comme la Colombie ou l’Afrique du Sud, la France est maintenant un des pays les plus violents d’Europe.

Cela n’a pas toujours été le cas. La première hausse de l’insécurité date des années 1970, avec notamment une forte hausse de la petite délinquance. La France, jusqu’à cette époque, était un pays calme où on laissait les clés sur le contact pour aller chercher son pain et on ne fermait pas les portes des maisons à clé. C’est dans les années 1970 que surviennent les premiers «Ne tentez pas les pickpockets», «Protégez votre foyer» devenus si habituels dans les transports en commun. Le taux de délinquance par habitant s’envole nettement à cette époque puis se stabilise. La population s’est adaptée à cette insécurité nouvelle et a modifié ses comportements.

La seconde vague est plus récente. Elle ne date que d’une dizaine d’années mais s’accélère dangereusement. C’est la hausse de la violence à proprement parler. Deux chiffres l’expriment : selon Infostats, le nombre de coups et blessures volontaires est en hausse continue depuis 2012 et la hausse s’accélère même à hauteur de 8 % par an ces dernières années. Encore plus parlants, les homicides et les tentatives d’homicide sont en hausse de 79 % depuis 2009, selon le criminologue Laurent Lemasson. La dernière année pleine, 2019, sera même l’année de tous les records puisque jamais autant d’homicides et de tentatives d’homicides n’avaient été enregistrés dans notre pays.

La chaîne pénale a déraillé

Lorsque son malade est sérieusement atteint et ce depuis plusieurs années, un bon médecin recourt à un traitement puissant. Atteinte par une violence et une délinquance qui menacent de dégénérer en gangrène, la France a besoin d’un traitement de choc pour pacifier le pays.

C’est d’abord la fameuse «chaîne pénale» qui doit être musclée. La chaîne pénale est le cheminement que connaît l’auteur d’un délit ou d’un crime depuis son interpellation jusqu’à l’exécution effective de sa peine. Cette chaîne pénale est composée de trois éléments : d’abord, la police. Elle se doit de retrouver et de neutraliser momentanément le délinquant. Ici, les policiers sont d’accord sur un point : l’État leur fournit les moyens matériels de remplir leur mission, le nombre de policiers ayant par exemple fortement augmenté depuis 2015.

Deuxième élément de la chaîne pénale, c’est le prononcé de la peine par la Justice. Une fois l’auteur du crime ou du délit retrouvé, la Justice établit la sanction qu’il doit recevoir puis transfère le coupable aux organes d’exécution de cette peine. Ce troisième élément, l’exécution de la peine, est l’œuvre des services pénitentiaires et des divers juges d’application ou d’aménagement des peines. Ils s’assurent que la peine prononcée soit bien exécutée. Ce sont aujourd’hui ces deux éléments, le prononcé et l’exécution de la peine, qui pêchent. En effet, trop nombreux d’abord sont les juges idéologues, pour qui la prison doit être évitée comme la peste. Trop nombreux sont-ils à pavaner un humanisme hypocrite et bêta dans les facultés de droit et dans les cours suprêmes (Cour de l’Union européenne, Conseil d’État, etc.…). Trop nombreux sont-ils, les juges politisés membres du syndicat de la Magistrature. À l’inverse, trop peu nombreuses sont les peines prononcées à hauteur de ce que prévoit le Code pénal. Mais surtout, et à la décharge des magistrats, beaucoup trop insuffisantes sont les places en prison. La construction de places de prison, le rétablissement des peines planchers sont ainsi autant de mesures indispensables et urgentes.

Une immigration irresponsable attise la délinquance

Lire la suite

Partager

partager sur Facebook partager sur Twitter partager sur LinkedIn envoyer par email

À consulter également