La justice pénale, absente des annonces du président de la République
Alexandre Giuglaris salue dans un premier temps la mémoire des victimes, la dignité de leurs proches et les personnes blessées ainsi que l’admirable travail des professionnels de santé et de nos forces de sécurité.
Le gouvernement et l’ensemble des décideurs politiques ont accepté l’idée que le pays est en guerre et que nos adversaires sont déterminés. Les annonces du président de la République vont dans le sens de la fermeté et du pragmatisme à l’image de l’état d’urgence. Cependant, la justice est une nouvelle fois la grande oubliée. Demander un alourdissement des peines, comme fait par François Hollande, sans veiller à garantir leur exécution relève soit de la bonne intention soit de la simple communication.
Par ailleurs, la garde des Sceaux semble faire part de sa réticence à la suite des annonces de l’exécutif, notamment concernant la déchéance de la nationalité. Encore une fois, Christiane Taubira reste au gouvernement sans y être solidaire. Cette rupture entre le ministère de la justice et le reste de l’exécutif est d’autant plus regrettable que la justice pénale est le maillon faible de la chaîne pénale
Le lien clair entre délinquance et terrorisme
Le lien entre délinquance, criminalité et terrorisme est connu. Un certain nombre d’auteurs d’attentats ont un long parcours judiciaire à l’image d’Amédy Coulibaly, en liberté au moment des attentats de janvier grâce au jeu des réductions de peine, mais aussi de personnes liées aux attaques du 13 novembre. Pourtant, rien n’est fait pour changer notre manière de penser notre justice pénale.
Celui qui a revendiqué ces derniers attentats pour Daech serait Fabien Clain, déjà condamné en 2009 à 5 années de prison pour avoir organisé l’acheminement vers l’Irak de plusieurs personnes. Lui aussi, libéré en 2012, a bénéficié de réductions de peine et d’une libération anticipée.
L’ajustement nécessaire de notre justice pénale
L’efficacité de notre justice pénale repose sur le travail des magistrats. L’organisation de notre système judiciaire doit permettre aux magistrats de mieux travailler et non l’inverse. Par exemple, la limitation à 10 ans de l’exercice de la présidence du pôle antiterroriste est à revoir. L’Institut pour la Justice propose la création d’un parquet national compétent en matière de terrorisme.
Les peines doivent être adaptées à la spécificité des profils terroristes. Incarcérés, il doivent être isolés des autres détenus. La perpétuité réelle et la rétention de sûreté doivent être possibles pour eux contrairement aux crédits de réduction de peine. Par ailleurs, il faut rapidement recruter davantage d’imams agréés et intégrer le renseignement pénitentiaire à la communauté du renseignement.
Les réformes de notre justice pénale à mener
La lutte contre le terrorisme commence par une justice pénale efficace. La réforme de la justice des mineurs souhaitée par la garde des Sceaux serait une mauvaise chose et enverrait un nouveau message d’impunité. La justice pénale sortirait renforcée de la suppression des réductions de peines automatiques, de la construction de 20 000 à 30 000 places de prison, de la mise en œuvre des décrets d’application de la loi renseignement, de la pénalisation la consultation de sites djihadistes, et, à l’échelle européenne, d’un Passenger name record (PNR).
Ces mesures préconisées par l’Institut pour la Justice ne sont pas viables si la garde des Sceaux et le Syndicat de la Magistrature s’y opposent. Ce syndicat a déjà vivement critiqué la mise en place de l’état d’urgence.