Le service statistique du ministère de l’Intérieur publie, chaque mois, des rapports qui font le bonheur de quiconque observe l’insécurité. Récemment, un nouveau rapport révélé par Le Figaro fait le lien statistique entre le trafic de drogue et la délinquance.
Rien de nouveau sous le soleil.
Ce lien n’a rien de nouveau et il n’étonnera personne. Il semble relativement évident que les trafiquants et usagers de drogues ont une tendance à commettre plus de crimes et de délits que la population moyenne. Mais ce rapport a d’abord l’intérêt de publier des chiffres confirmant ce ressenti.
On peut cependant aller plus loin. Une des clés fondamentales de la criminologie est le fait que les délinquants d’habitude sont, en général, loin de se cantonner à un seul type de délit. Ils sont «multitâches».
En effet, plusieurs études sociologiques ont même prouvé qu’une minorité de délinquants commet une majorité de délits. C’est ainsi qu’une étude du sociologue Sébastien Roché avait fait parler d’elle au début des années 1990. Il avait interrogé 2300 collégiens sur les délits qu’ils commettaient. 5% de ces collégiens ont avoué commettre 48% des petits délits et 86% des délits graves.
“Estimé à 3 ou 4 milliards d’euros et net d’impôts, le trafic de drogue ferait vivre environ 236.000 personnes directement et indirectement.”
Pierre-Marie Sève
De l’autre côté de l’Atlantique, au Québec, le criminologue Maurice Cusson avait publié une étude dans la Revue internationale de criminologie et de police technique dans laquelle il relevait que 5% des adolescents de Montréal étaient responsables de 60% des délits.
Ces études, reprises en son temps par le président de la République Nicolas Sarkozy, tendent donc à prouver notamment que la justice doit se montrer particulièrement sévère avec ces 5% des délinquants «indécrottables». Ils doivent demeurer en prison pour une longue période. Autre enseignement : tous les délinquants ne commettent pas de délits graves, mais ceux qui commettent de délits graves en commettent également de petits. Il reste à la justice d’en prendre acte.
De l’importance de vaincre le trafic de drogue.
Mais cette étude a aussi le mérite de rappeler l’importance urgente du combat contre la drogue.
Ce trafic est déjà immense. Estimé à 3 ou 4 milliards d’euros et net d’impôts, le trafic de drogue ferait vivre environ 236.000 personnes directement et indirectement. Le marché du cannabis a par exemple été multiplié par 6 en 10 ans et Paris est devenue la capitale européenne du crack.
Le danger de ce combat contre la drogue est de laisser se développer non seulement les conséquences funestes des drogues sur la santé des citoyens, mais aussi de laisser se développer les réseaux de trafiquants. Plus les organisations criminelles croissent en puissance, plus elles infiltrent la société, par le biais de la corruption, jusqu’à la police, l’armée et hautes fonctions politiques. Ce phénomène rend ainsi chaque jour qui passe plus élevé le coût pour démanteler les trafics. La guerre des cartels au Mexique, par exemple, a fait environ 300.000 victimes en 15 ans.
“Une justice qui ne punit pas les coupables entretient le sentiment d’impunité et ce sentiment d’impunité encourage les délinquants à commettre plus de crimes ou des délits.”
Pierre-Marie Sève
Mais comment vaincre le trafic de drogue ? Ces trafics semblent pourtant être des phénomènes incompressibles de la vie humaine : il y aura toujours des consommateurs de drogue et donc, toujours des trafiquants.
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